Club de jardinage d'Ans - Résumé des conférences

Retour aux résumés des conférencesCe que les noms des fleurs ont à nous dire

Résumé de la conférence de A. Lebruns

L’étymologie florale nous ramène au passé et nous révèle la façon dont les anciens ont regardé les fleurs et la nature.

1. L’origine des mots.
La plupart de nos noms de fleurs proviennent du grec, du latin et du gaulois.

Ainsi le latin a 24 noms différents pour désigner la camomille, chacun de ces mots évoquant un regard différent : un mot pour en dire la beauté, un autre l’odeur, un troisième l’efficacité etc…

La richesse de la civilisation romaine est au départ rurale, fondée sur la nature ; pour preuve, un ouvrage comme « De agricola » ou encore les termes français qui ont rapport à la fortune comme « pécuniaire, impécunieux » ; ils dérivent du mot latin « pecus » désignant le troupeau. Autre preuve encore à partir du mot latin « nihil » qui signifie « rien » et qui se traduit littéralement par « il n’y a même pas la trace (ni) du petit point noir de la gousse du haricot (hil).

Le grec Aristophane révèle dans son œuvre une richesse de vocables de fleurs ou d’animaux : il parle par exemple d’un regard de cresson ou d’origan. Le lierre, lié au culte de Dionysos(Bacchus) est évoqué par de très nombreux mots grecs, chacun dévoilant un aspect différent de la plante.

Le gaulois nous est mal connu (nous en connaissons environ 800 mots) parce qu’il ne nous a pas laissé d’écrits ; cette civilisation est elle aussi liée au monde végétal, comme l’indique le calendrier, fondé sur les arbres. Des mots comme « bruyère », « bugle » ou « potentille » proviennent du gaulois.

Enfin pour certains autres noms ,l’origine est diversifiée puisque les uns proviennent du germain, comme la berce qui évoque l’ours (ber en allemand) ; d’autres mots ont une origine orientale ; le pétunia est amazonien ; l’ajonc est préceltique ; notons aussi que certains mots tirent leur origine du nom d’un botaniste ou de leur découvreur; c’est le cas du camélia ou du fuchsia(Fuchs).

2 Le sens des noms est lié à la nature.
Voici quelques exemples parmi d’autres : Les noms évoquent un lien avec la nature

  • La renoncule aquatique qui prolifère dans l’eau signifie petite grenouille (rana et diminutif cula).
  • Le drossolis ou drosera, plante insectivore des tourbières d’Europe, signifie rosée (ros) du soleil (solis)
  • Le serpolet qui vient du latin serpullum signifie le petit serpent.
  • L’achillée : aux feuilles blanches.
  • L’aconit, poison violent, venant de « a conitum » c.à.d. « sans poussière » met en garde celui qui s’aventure à en manger : le combat contre le poison sera sans poussière, c’est-à-dire sans merci.
  • L’anémone pulsatile (du grec anémos, le vent et du latin pulsare, vibrer, pousser ):qui vibre au vent.
  • L’anis vient du grec ana qui signifie « en bas ».
  • L’arum tire son nom du latin arare (cultiver les champs) parce qu’ on trouve la plante dans les champs cultivés.
  • Le chèvrefeuille est aimé des chèvres.
  • Le fenouil signifie le petit foin (feniculum se décomposant en feni=foin et culum=petit). Le mot pouvait même s’adjoindre un adverbe permettant de dire « fenouillement « de sorte qu’on pouvait exprimer son état en disant « je me porte fenouillement » !
  • La lavande évoque les choses qui doivent être lavées.
  • L’origan signifie la beauté de la montagne (du grec oros, montagne et ganos( ?), beauté).

Les noms des fleurs donnent la couleur

C’est le cas de l’amarante, du bleuet, du coquelicot (onomatopée du cri du coq dont la fleur évoque la couleur de la crête), de la violette, du fuchsia.

Les fleurs évoquent la situation dans le temps ou dans l’espace.

En effet, sans calendrier, les anciens définissaient le temps en fonction de l’évolution de la nature, par exemple « à l’époque où fleurissent les chardons » En voici quelques exemples :

  • La chélidoine évoque l’arrivée des hirondelles.
  • La primevère évoque sa floraison au début du printemps.
  • Le myosotis s’appelle communément « ne m’oubliez pas »
  • L’expression « il n’en est pas encore au persil » signifie qu’ «’il n’en est même pas au début ».

Le nom des fleurs est en relation avec l’usage qu’on en fait.

  • La bugle est en rapport avec un nom latin qui indique que la fleur servait à guérir l’induration du mamelon.
  • L’anémone Sylvie était mâchée pour avoir des idées claires.

Le nom des fleurs est en rapport avec une formule magique.

C’est le cas des exemples suivants :

  • La sarriette qui donne assez(satis en latin) de plaisir ;
  • la consoude qui soude ou réunit(latin solidago, je réunis) ;
  • le réséda donne la consigne de se calmer( du latin sedare, faire asseoir) ;
  • le tussilage doit agir sur la toux ;
  • la pervenche impose de vaincre la maladie(du latin vincere,vaincre) .

D’autres noms de fleurs évoquent un lien social, par exemple la résistance des prêtresses devant un changement de société et l’instauration du nouveau culte dédié à Apollon : glaieul fait ainsi allusion à la déesse –mère Déméter et à la restauration du temple.

Parfois des erreurs se sont glissées dans le nom des fleurs

La patience ou oseille vient du grec « lapasso’ »qu’on a mal compris en le scindant en 2 (« la passo’ »).

L’étude des noms des fleurs a permis aussi à notre conférencier de faire quelques découvertes.

  • Le grec désigne d’un mot précis le « bois » d’asphodèle ; or la tige de la fleur n’a rien d’un bois sauf si on découvre qu’on trempait la tige dans de l’huile et qu’ainsi rigidifiée, elle pouvait servir de candélabre.
  • La bruyère se dit « erica », c’est-à-dire »déchirée ; en effet en région méditerranéenne, la bruyère arborescente a des branches qui peuvent déchirer.
  • La prèle se dit « queue de cheval »parce qu’on attachait de grandes tiges de prèle à la queue de l’animal pour éloigner les mouches.
  • Appeler l’œillet « dianthus « ou « fleur du dieu » est une erreur ; en réalité, l’origine du mot vient de « ocellus, petit œil » en rapport avec les ocelles de l’œillet.

3. Conclusion : on le voit les anciens étaient imprégnés de la nature bien plus que nous.

Pour approfondir ce docte sujet, bien instructif , les livres d’Alain Lebrun seront de grande utilité : Prénoms floraux, La symbolique des noms de fleurs ; Le sens caché des fleurs .

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