Si l’homme découvrit le vin par hasard voici plus de 10.000 ans, il lui fallut d’abord découvrir le rôle des levures, puis savoir comment extraire le sucre, comment mesurer l’acidité du jus de fruit et comment la modifier pour utiliser les jus de fruits en vue d’en faire du vin.
Les fruits vinifiables.
La plupart des fruits cultivés conviennent, mais les plus intéressants sont la pomme et la cerise dont le taux de sucre et l’acidité sont proches de ceux du raisin. Fraises, rhubarbe, poires, pêches, groseilles peuvent convenir aussi. Parmi les fruits sauvages, pensons aux mûres, framboises, myrtilles, nèfles ou cornouilles. Les fleurs comme les primevères, pissenlits ou tussilages conviennent et parmi les arbres, pensons aux bouleaux et aux érables. L’idéal est de vinifier les fruits du jardin ou cueillis dans la nature.
La fabrication d’un vin de fruit
- La cueillette : seuls seront choisis les fruits sains et mûrs. On conseille de vinifier un minimum de 20 litres, quantité moins sensible aux variations de température.
- Les fruits seront lavés, plongés dans une solution soufrée destinée à éliminer les levures et bactéries, puis rincés abondamment pour éliminer le soufre.
- La congélation des fruits (sans être obligatoire) facilitera l’extraction du jus.
- Les fruits doivent alors être broyés avec un pilon ou un hache-betterave pur les fruits plus fermes ; on peut ajouter une solution soufrée pour tuer les germes nuisibles et une levure spéciale (pectinase) destinée à détruire la pectine qui rend le jus moins fluide. On laisse alors la pulpe reposer.
- Le jus récolté par le broyage sera placé dans un récipient qui servira à la fermentation (tourie, fût en plastique) et qui sera d’une contenance plus importante que le jus recueilli afin de pouvoir faire face à la fermentation.
- Vient ensuite le pressage ; une étamine suffira pour presser une quantité réduite de pulpe, mais il faudra disposer d’un pressoir pour une quantité plus importante ; il faut d’abord enfermer les fruits broyés dans une toile de jute ou de nylon puis disposer les fruits en couches successives, séparées elles-mêmes par une toile. Entre chaque tour de vis, il faut laisser au jus le temps de s’écouler.
- Pour abaisser l’acidité souvent trop élevée, on procède au remiage : on récupère la pulpe restant après le premier pressurage, on la remue fortement, la replace dans le récipient de congélation et on lui ajoute de l’eau tiède (environ 3 à 5 litres par seau de pulpe). Après avoir laissé macérer cette pulpe une heure ou deux, on la presse à nouveau. Le jus obtenu grâce aux différents pressurages est vidé dans le récipient de fermentation. On aura soin de laver et de désinfecter au soufre le matériel ayant servi au pressurage ; quant à la pulpe restante – le marc – elle servira d’engrais ou de nourriture pour bétail.
- Il faut maintenant analyser l’acidité et la densité du moût .Une certaine acidité est nécessaire à la conservation du jus ;
l’idéal se situe entre 6 et 9 gr. d’acidité par litre. On rajoutera de l’acide citrique ou malique si le moût est trop peu acide
et du carbonate de calcium s’il est trop acide. L’acidité étant corrigée, on mesure grâce à un densimètre la teneur en
sucre qui permettra de déterminer le degré d’alcool.[1]
- La chaptalisation consiste à ajouter le sucre nécessaire ; il faut 19 gr.de sucre pour obtenir un degré d’alcool et le taux idéal d’alcool se situe à 9, voire même11°pour un vin agréable. le sucre dissous dans un peu de moût sera ajouté au reste dans le récipient de fermentation que l’on aura soin alors de bien remuer. On peut terminer cette étape en ajoutant une dose de pectinase et une dose de solution soufrée.
- Vient maintenant l’ensemencement ; pour cela, il faut parfois préparer un pied de cuve avec des levures sélectionnées, vendues généralement lyophilisées. On place la levure lyophilisée dans un récipient contenant de l’eau, un peu de moût et du sucre ; quand l’écume apparaît- signe que les levures sont en activité- le pied de cuve est mélangé au moût en vue de la fermentation ; aujourd’hui, la plupart des levures, prêtes à l’emploi, ne nécessitent plus cette préparation du pied de cuve. On terminera cette phase en ajoutant au moût du sel nutritif et- si nécessaire - une dose précise de tanin.
- Le moût est prêt pour la fermentation. On bouche le récipient de fermentation avec un bouchon muni d’un barboteur et on place le récipient dans une pièce tempérée (15à 18 degrés). La fermentation alcoolique va commencer, se manifestant par de la mousse et de grosses bulles ; les levures mettront quelques jours à transformer le sucre en alcool ; la fermentation malolactique suivra, beaucoup plus longue et moins agitée ; durant cette phase, le vin perd son acidité et prend tout son arôme. Les levures, gênées par l’alcool qu’elles ont produit, finissent par tomber au fond du récipient pour former la lie.
- La fermentation terminée (il n’y a pratiquement plus de bulles), grâce à un simple tuyau, on procède à un 1er soutirage, afin de séparer la lie du vin et on place le vin soutiré dans un récipient ayant le même volume que le vin ; le soutirage se fait par temps clair, car la haute pression favorise la précipitation des particules en suspension ; pour clarifier ce vin qui contient encore de nombreuses particules en suspension, il faut le laisser reposer quelques semaines dans un endroit frais, le froid favorisant la clarification, puis procéder à un dernier soutirage. On doit alors mesurer le degré d’alcool grâce à un vinomètre. Depuis le début de la fermentation, 8 à 12 mois se seront écoulés.
- On prendra bien soin de laver puis de désinfecter les bouteilles avec un produit adéquat et de les rincer à grandes eaux avant de les mettre à égoutter ; lorsque les bouteilles seront bien égouttées, le vin- qui doit être parfaitement clarifié- sera soutiré et les bouteilles bouchonnées. Les bouchons sont d’abord assouplis dans de l’eau tiède puis placés grâce à une bouchonneuse ; les bouteilles restent debout quelques jours pour que le bouchon se place correctement dans le goulot et enfin sont couchées en cave où elles peuvent bonifier.
Conclusions :
- · Consigner toutes les opérations effectuées dans un livre de cave permettra de corriger les erreurs éventuelles et d’améliorer la qualité du vin fabriqué.
- Si la fabrication des vins de fruits exige de la patience et de méticulosité, elle ne requiert cependant que peu de matériel spécialisé et peu d’espace si la production n’excède pas quelques dizaines de litres.
- De nombreuses confréries et les clubs d’amateurs pourront aider tous ceux que tente la fabrication de vins de fruits.
[1] Pour plus de précisions concernant la façon de mesurer l’acidité et la densité, se référer à l’ouvrage de M. Gason : Fabriquez votre vin de fruits .
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